Il y a deux choses qui m'énervent plus que tout quand je parle cinéma avec quelqu'un. La première, c'est le snobisme, l'intellectualisme faisandé de la critique pourri, malheureusement une pratique courante chez certains blogueurs (mais ils ne sont pas les seuls, ma classe en est remplie) qui estiment avoir le droit, du haut de leur petite culture de cracher sur le travail des réalisateurs, des scénaristes, des acteurs et j'en passe, alors qu'ils n'ont pas eux-mêmes le moindre talent ni le moindre savoir technique pour regarder de haut le travail de ces gens-là. Qu'on n'aime pas un film, soit, c'est un fait, même s'il y a de bonnes et de mauvaises raisons (par exemple, dire d'un Rambo "La violence est inutile", c'est une mauvaise raison, comme dire d'une comédie musicale "Y a trop de musiques"... mais ça c'est mon deuxième point alors vous irez voir plus bas !), mais critiquer de manière condescendante, voire carrément méprisante, mais sérieux les mecs, faut arrêter ! Avant de dire "Bah, c'est de la merde", comme pour les aliments, vous dites "Je n'aime pas", pour telle ou telle raison après tout, le cinéma, comme tout art, est soumis à la sensibilité personnelle de chacun.
La critique a dit de telles conneries sur certains films ou certains acteurs qu'elle est directement responsable de leur "cataloguisation" ; certains, en cherchant à y échapper, ont bien failli s'y brûler les ailes (Stallone, pour ne citer que lui, est revenu de loin après ses tentatives dans la comédie - mais, considéré comme has been, il a fallu qu'il se batte pour revenir à ses mythes fondateurs). Il y a des sujets alléchants pour la critique : je suppose qu'un direct-to-dvd de Steven Seagal ne doit plus faire bander les milliers de journalistes coincés qui sont incapables de se dire qu'un film peut être fun, décomplexé, violent, pour le plaisir du bourrinage pur et dur. Mais des petits films de genre français dont les réalisateurs se démènent comme des beaux diables pour avoir un nombre décent de copies, ça oui, ça c'est bien, ça fait couler de l'encre, ça hérisse le poil des bien-pensants, et ça permet de garder clean la production française (quoique tout doucement, ils ont du mal \o/). Bref, autant dire qu'on a pas fini, nous autres, ardents défenseurs de la cause bourrine ou simplement divertissante, qui croyons en la diversité du cinéma et qui savons donner leur chance à tous les types de productions, face aux Club des Balais Coincés dans le Derrière, de nous battre contre des moulins à vent, Don Quichotte modernes parfois bien seuls !
Le deuxième truc qui a l'art de me faire partir en pétard, c'est "Pfff, toute cette violence est inutile". C'est le cas de mon cher paternel. Je prends l'exemple le plus récent, car ce débat entre nous n'est pas nouveau, depuis ma Seconde, époque à laquelle je suis sortie de la surprotection médiatique, et où j'ai appris en deux mois à quel point le cinéma pouvait être violent. Je lui ai donc vanté John Rambo, de Sylvester Stallone, qui m'a foutu une très grosse claque que j'avais envie de partager avec un maximum de monde (d'où ma critique élogieuse à son endroit). Et le week-end dernier, j'ai pu le lui faire visionner, à lui et à ma mère également. Je ne m'attendais pas à ce que ce type de violence le dérange, parce que s'il déteste ouvertement Quentin Tarantino pour sa capacité à tourner la violence en dérision, et à en faire tellement que cela devient archi-rock'n'roll, dans un film comme John Rambo, qui ne cache pas son penchant pour les codes du film de guerre, je la percevais comme conditionnée par le genre lui-même, à savoir qu'il me paraissait incontournable que dans un Rambo, les têtes et les tripes ne volent pas, et que les scènes de massacre ne nous serait pas épargnées, de la même manière que dans Il faut sauver le Soldat Ryan, la scène du débarquement se devait d'être une boucherie innomable. Vous imaginez une comédie musicale sans chorégraphies ? Bah moi non plus. Et je n'imagine pas un film dont le scénario prend pied dans un contexte de génocide (puisqu'il est présenté comme tel dans le film) sans atrocités - dépeintes avec crudité certes, bien que sans complaisance aucune. Bref, autant vous dire que quand il m'a sorti le coup du "La violence du film est inutile", j'ai viré au rouge vif. Mais il est fallait plus pour me faire sortir de mes gonds, puisqu'à force, j'avais pris l'habitude de ce genre de critiques... Non, ce qui m'a définitivement fait halluciner, c'est le "D'ailleurs, là, pour le coup, elle est surtout commerciale". La bonne blague. Autant dans les bouses intergalactiques qu'ont constituées les derniers Saw (à partir du III, en fait, parce que le I est génialissime et le II est passable), oui, la violence est commerciale - le but étant de montrer un maximum d'atrocités pour un minimum de scénario (et donc de temps sur la péloche) - mais dans John Rambo, non, certainement que non ! Tout comme dans Martyrs, de Pascal Laugier (si comparaison est possible, parce que la violence de Martyrs est autrement plus insoutenable et dans un genre totalement différent) par ailleurs, qui a soulevé des polémiques incroyables lors de sa sortie (et même avant, compte-tenu du débat à propos de sa censure aux moins de 18 ans), la violence dans ce genre de film n'a pas d'autre but que de soulever le dégoût, la répulsion. Les scènes de massacres de John Rambo, les tueries d'enfants, les exécutions sommaires, les viols, et j'en passe, n'ont pas d'autres visées que d'intégrer l'histoire du film à son contexte choisi, et avec une mise en scène adaptée avec les codes appropriés, allant parfois jusqu'à la dénonciation, même si John Rambo n'a pas vocation à être simplement un plaidoyer humaniste, mais un bon film d'action old-school. Et quand mon père me sort que le premier Rambo était moins violent... Mais bordel de Dieu, la scène de torture, les boucheries du Vietnam, vous avez déjà oublié ? Certes, ils n'avaient pas les mêmes moyens techniques, n'empêche que le film n'y allait pas non plus avec une demie-molle ! Et puis oui, pourquoi avoir honte de l'avouer, la fin ultra-violente de John Rambo, où tous ces encu*** prennent cher dans leurs gueules, et où le vrai méchant du film se retrouve les tripes à l'air, j'ai trouvé ça jouissif. Il y a quelque chose de la catharsis grecque dans ces films - poussée à l'extrême dans certains, certes - mais après tout, dans tous les films où le méchant est puni à la fin, qu'on voit ses tripes ou non, il y a purgation, soulagement. Tas de petits génies qui vous levez sur vos sièges en hurlant au scandale, souvenez-vous que les Romains et les Grecs ont mis cela en évidence bien avant nous, et que vous n'y échappez pas non plus.
Bref, comme dans les jeux vidéo, la violence au cinéma pose problème. Je n'ai aucun problème avec, personnellement, quand elle est bien utilisée, ou justifiée par le genre ou le scénario, même si je reconnais qu'elle peut rebuter certains (pour des raisons de sensibilité, j'entends). Mais de là à faire appel à la censure à tout va, au nom de la sauvegarde de l'innocence de nos charmantes têtes blondes... Avant d'aller hurler au scandale quand le moindre film un peu violent rencontre le succès, chers spectateurs, allumez simplement votre télé à 20 heures sur TF1. J'y ai personnellement vu, il n'y a pas si longtemps, la vidéo en direct d'un soldat américain sautant sur une mine antipersonnelle à un mètre de la caméra. Quand on pense que cette même chaîne refuse de manière systématique de produire ou de diffuser des films de genre français, on est en droit de penser que quelque chose d'ironiquement cruel se joue.